Les parisiens sont arrivés jeudi soir. Nous étions 25 à se retrouver avec plaisir sur le port de la Rochelle. Après une soirée bien animée, la journée a débuté ce matin par la présentation d’Emmanuel Bernard sur les Communautés.
Emmanuel travaille chez JBoss RedHat. Actif dans la communauté, il est aussi l’instigateur du podcast « Les CastCodeurs ». Il contribue aussi à la communauté Hibernate, et c’est donc avec un oeil avisé qu’il nous parle des communautés ce matin.
Première prise de conscience : vous faîtes du Java ? vous utilisez Scrum ? vous aimez C# et le monde .NET ? Sans le savoir vous faîtes déjà partie d’une communauté. Que vous soyez fan de Starcraft2, commiter Maven, membre du JCP ou sur les réseaux sociaux comme Facebook ou autre : vous appartenez à des communautés.
Une communauté est un ensemble de personne qui partage et utilise un patrimoine commun. Une communauté est formée indépendamment de la volonté de ses membres. Emmanuel explique qu’ils ne décident pas de leur implication.
C’est un terme assez galvaudé. Il explique que chaque communauté a finalement un contrat explicite ou implicite. Les relations sont souvent asymétriques, mais les communautés qui marchent le mieux sont celles où la hiérarchie et légère et naturelle.
Pour qu’une communauté marche, il faut qu’elle soit ouverte dès le premier jour. Sur JBoss et les forums, à un moment donné les personnes de JBoss étaient perçues comme un peu glaciale, à force de répéter sans cesse les mêmes choses. En laissant la communauté s’auto-gérer, les forums ont repris de l’intérêt, et ils fonctionnent encore très bien.
Emmanuel propose une approche collaborative. Il fait une analogie entre Git et Svn. L’approche Git appliquée à une communauté est plus moderne. Cela supprime l’asymétrie et le côté monarchique.
Dans une communauté, chacun prend un rôle plus ou moins actif. Il y a le créateur bienveillant, celui qui a sa photo dans le hall d’entrée, ou celui qui s’oppose à Oracle et qui lance ses teeshirts. Il y a les leaders reconnus. Je reconnais là la notion de Leader, que l’on peut découvrir dans le livre « Tribus » de Seth Godin. Emmanuel, c’est un petit livre à lire qui est sympa.
Les contributeurs ensuite, sont actifs et apportent à la communauté. Les participants sont plus ou moins actifs. Enfin il y a la majorité des gens qui utilisent sans intervenir, et il y a aussi les supers lourds qui remplissent les forums et les listes de diffusions, sans jamais produire quelque chose de positif. Oui il y a des Supers Connards, mais cela ne représente qu’une minorité…
Pourquoi s’impliquer dans les communautés ? En fait dans cette partie, Emmanuel essaye de comprendre pourquoi les gens s’investissent. Quelles sont leurs motivations ?
La reconnaissance des autres, le plaisir de partager avec d’autres personnes ses idées par exemple. Peut-être ensuite un intérêt financier, en devenant expert dans la communauté.
Il y a aussi la croyance en quelque chose. Emmanuel explique que l’objectif des CastCodeurs est de monter aux développeurs qu’ils peuvent occuper une place active dans leur entreprise, et qu’ils ont de l’or dans les mains. J’ai bien aimé cette réflexion, et je pense que j’en reparlerai en octobre à Soft-Shake.
Pour terminer, Emmanuel nous encourage, et vous encourage à participer à la communauté. Je le rejoins complètement. Laissez tomber le côté TV, où vous consommez des blogs, des sessions des Users Groups, et essayez de trouver quelque chose à faire. Cela peut être en écrivant du code, en préparant une présentation, en s’impliquant dans la formation de vos collaborateurs ou en faisant une veille active, avec restitution.
Je le rejoins aussi sur l’idée où plus tu t’impliques dans la communauté, plus tu y gagnes.
Bon, d’accord, participons.
J’ai l’impression que dans cette intervention, Emmanuel reprend pas mal des thèses qui ont conduit Jeff Artwood à fonder StackOverflow.com et tous les sites équivalents.
Merci beaucoup pour ce compte-rendu.
A défaut d’avoir pu être sur place, ça me permet de suivre à distance : j’attends les prochains compte-rendus avec impatience !
Voilà un nouveau billet intéressant.
J’en déduis que la communauté, c’est du web 2.0, voire du web 3.0 😉
Allez, je me lance :
– web 1.0 : des utilisateurs consommateurs
– web 2.0 : des utilisateurs consommateurs et producteurs (mais individualistes ?)
– web 3.0 : des utilisateurs moins individualistes, plus organisés en communautés
???
Perso, je vois quelques fois la reconnaissance comme une monnaie : ainsi, à défaut de ne pas être tout à fait payés exactement à leur juste valeur, certains salariés peuvent apprécier d’être au moins reconnus à leur valeur, par le plus grand nombre, i.e. pas seulement par leurs chefs, mais aussi par leurs pairs.
C’est pourquoi je pense qu’une entreprise peut avoir un intérêt (indirect) à proposer à ses employés un réseau social interne, au croisement des outils de gestion de la compétences, de gestion des talents, de l’intelligence métier… Malheureusement, les entreprises n’ont souvent pas compris l’intérêt des divers outils de collaboration… i.e. l’intérêt des communautés.
Cela me rappelle une « anecdote » issue du Monde Diplomatique.
Il y a eu un tournant dans les relations au travail, un tournant qui se serait opéré dans le courant des années 70, suite aux mouvements qui se sont déroulés lors de la décennie précédente. Le numéro de mars 20006 du Monde Diplomatique – http://www.monde-diplomatique.fr/2006/03/ – apporte un éclairage intéressant via 2 articles :
– « Hier solidaires, désormais concurrents » : http://www.monde-diplomatique.fr/2006/03/LINHART/13260
– « Tout a commencé un jour de 1972 » : http://www.monde-diplomatique.fr/2006/03/LINHART/13261
Ces 2 articles relèvent de la même situation de fond. L’auteur y affirme que l’individualisation érigée en réponse à certaines aspirations manifestées en 1968, telle la prise en compte de la personne, de ses besoins, de son mérite, a eu comme effet la dislocation du groupe des salariés en tant que force collective. L’idée de projet collectif a disparu petit à petit tandis que s’y substituaient l’individualisation, notamment dans la relation à la hiérarchie, la mise en concurrence, et l’obligation de faire sans cesse ses preuves.
En voici un exemple. Dans les années 60, une augmentation se négociait avec la direction, qui était en première ligne et était directement responsable de l’augmentation. Maintenant, c’est généralement un peu différent : un volant d’augmentation est assigné à un département et est réparti entre les membres de ce département. De ce fait, ces personnes ont été ainsi poussés à entrer en concurrence les unes avec les autres.
Bref, au fond, cela n’est pas tellement étonnant que le monde de l’entreprise se méfie des communautés, car il se méfie du collectif, hors organisation hiérarchique.
Bon, une communauté, c’est un peu le retour du collectif débarrassé de certaines scories, car revisité par la montée en puissance de la société de la participation. Vue comme cela, le concept de communauté est présentée de manière un peu grandiloquente, et pas forcément alléchante 😉
En fait, une communauté, je crois surtout qu’elle permet de s’investir dans un projet qui nous dépasse, défini par un but souvent inatteignable par une seule personne, et pour lequel toutes les aides sont les bienvenues, et généralement aussi indispensables les unes que les autres. Et elle captera d’autant plus d’attentions qu’elle est architecturée pour maximiser la participation, cf. « The Architecture of Participation » http://oreilly.com/pub/a/oreilly/tim/articles/architecture_of_participation.html