Si je te dis « usi_2012_e01s05_vostfr » je me doute que tu penses à ce petit film de famille que ton cousin américain t’a gravé sur un CD et que tu vas recevoir la semaine prochaine… ou pas. Ou plutôt à la 5ème édition de la conférence USI, organisée par OCTO Technology. Rappelons le synopsis : 2 jours de conférences en Anglais et en Français, en plein coeur de Paris dans le Palais Brongniart, avec 750 participants. L’USI est une conférence indépendante qui permet de réunir les Geeks et les Boss, et de regarder vers l’avenir. Chaque année, c’est aussi l’occasion de réunir d’une part ceux qui ont une bonne idée, et d’autre part ceux qui savent la coder.
Ce matin, ouverture par une présentation des nouveautés de la saison 5 par François Hisquin, PDG d’Octo Technology. Vous pouvez suivre le stream Live de l’USI sur le site : http://www.usievents.com. L’ensemble des vidéos de la conférence seront accessibles rapidement, grâce au boulot de Brainsonic. Merci à Octo aussi de partager toute cette connaissance.
Les 2 jours sont divisés en 4 thèmes différents :
- Comprendre
- Changer
- Construire
- Rêver
Nous commençons par une des fameuses Keynoyes de l’USI, sur le thème « Comprendre » par une présentation percutante de Jane Mc Gonigal sur le Gaming. Comment les jeux vidéos changent nos vies et ont une influence sur notre monde ? Comment mobiliser l’énergie des foules pour résoudre des problèmes qu’une armée d’ordinateur n’est pas capable de résoudre ? A quel point le jeu est important ?
Jane Mc Gonigal et auteur de livres et directrice artistique chez Super Better Labs. Sa société s’intéresse à l’apport du gaming dans la résolution de problèmes sérieux ou non. Pour commencer, quelques chiffres sur le nombre de joueurs de jeux vidéos dans le monde : 1 milliard d’humain. Environ 40% de femmes. Le jeu vidéo en 2012 est une industrie. La sortie d’un jeu comme Modern Warfare 3 par exemple va vous faire comprendre que l’on est pas dans une industrie de Mickey. Modern Warfare 3 (oui va googler ce nom) c’est 400 millions de dollar de recettes pour les seules 24 premières heures de sa sortie… Plus de 6.5 millions de copie du jeu vendues en une journée… Vous vous dites que c’est moins bien qu’un blockbuster au cinéma ? C’est faux. Aujourd’hui l’industrie du jeu vidéo génère avec ce type de jeu plus d’argent que les derniers battements de sourcils de Jennifer Hanniston. En 14 jours, MW3 a rapporté plus d’un milliard de dollar à Activision…
Tout ceci a un impact économique. Lorsque votre industrie parle en milliard, fini de jouer. Prenez AngryBirds, 1 milliard de téléchargement et plus d’un milliard de joueur. C’est plus que Facebook. Le plus gros réseau social est battu par un seul jeu… Jane explique que le temps passé à jouer à AngryBirds représente 325 000 années, plus de 300 millions d’heures par jour. Un joueur sur MW3 peut passer jusqu’à 170 heures pour résoudre les challenges posés par le jeu…
Revenons dans notre monde de l’entreprise un instant. D’après une étude Gallup 2011, 71% des employés aux USA sont désengagés activement de leur job. Chaque jour ils viennent au travail sans motivation et sans intérêt. Ils pensent souvent que leurs talents ne sont pas utilisés. Cela entraine du stress, des dépressions, et coûte 300 millions de $ aux entreprises américaines.
A l’opposé de cela, si l’on regarde l’économie de l’engagement, comment des comportements similaires à ceux mis en oeuvre dans les jeux vidéos peuvent contribuer à construire quelque chose ? Prenez Wikipedia par exemple. Un très bon exemple de travail collaboratif.
Un chercheur a calculé que Wikipedia représente 100 millions d’heures de travail.
Bon.
Et bien 100 millions d’heures de travail c’est 30 jours d’Angry Birds. Et c’est 7 jours de Call Of Duty, Modern Warfare 3. Dingue non ?
The total number of hours consumed by Angry Birds players world-wide is roughly 200 million minutes a DAY, which translates into 1.2 billion hours a year. To compare, all person-hours spent creating and updating Wikipedia totals about 100 million hours over the entire life span of Wikipedia (Neiman Journalism Lab) source de l’article
Lorsque l’on regarde les enfants, 99% des garçons de moins de 18 ans jouent aux jeux vidéos aux USA.94% des filles. Et plus surprenant, beaucoup d’enfants de 2 à 3 ans jouent avec l’iPad de papa, acheté un bras soit-dit en passant. Allez je suis certain que ton fils ou ta fille te met la paté à Angry Brids.
Nous sommes tous des gamers, n’importe qui avec un smartphone a désormais accès à des jeux simples ou complets. C’est un fait. 2012 c’est l’année qui confirme que le jeu est partout, dans les mains de tout le monde.
Lorsque l’on regarde le jeu, il est intéressante de lister les facteurs qui font que les gens « jouent », par ordre croissant
10.joy
9.relied
8.love
7.surprose
6.pride
5.curiosity
4.excitement
3.awe et wonder
2.contentment
1.creativity
Un jeu est un générateur d’émotions important. Jane explique que 80% des gens qui jouent à un jeu vidéo n’arrivent pas à le terminer et passent en fait la majorité de leur temps à « échouer ». Vous voyez ce « Game Over » qui tourne sur l’écran ? Et qui se répète encore et encore ? Complètement à l’inverse de notre rapport à l’échec et l’erreur dans la « vraie vie ». Force est de constater que le jeu nous apprend à perdre et à reconnaître nos erreurs, chose qui est complètement tabou dans l’éducation classique. Ok, un peu capilo-tracté (tiré par les cheveux) mais j’adhère à cette idée. On reparle d’erreurs et d’échecs tout à l’heure dans un autre billet.
La question maintenant : et si nous pouvions apporter à nos clients cette créativité et cette énergie, que l’on mobilise dans un jeu, mais pour des problèmes métiers ? Et si par exemple, le calcul du risque de ta grosse banque était en fait un gros jeu en ligne, avec de vrais joueurs qui jouent avec la vraie dette de l’Espagne ou de la Grèce ? All-in !
Avant de terminer, Jane avance ensuite des faits scientifiques pour rassurer et nous éduquer sur l’influence des jeux vidéos chez les autistes, les enfants, les personnes qui souffrent d’hyper-activité. Elle apporte des preuves que les jeux vidéos (peut-être pas tous) ont une influence sur notre cerveau et le développement de celui-ci. Une autre étude montre que les social gamers (ceux qui jouent à Farmvill sur Facebook) tendent à être plus généreux et à aider des vrais gens dans la vraie vie… après avoir pris soin par exemple de votre jardin virtuel pendant vos vacances (réelles). Vous suivez ?
Une autre étude montre que les jeux vidéos sont plus efficaces que les neuroleptyiques pour les dépressifs. Chéri, j’arrête le Tranxen et je vais faire un tour avec mon AK-47 pour me défouler… Tout un programme.
Le message semble être : un peu de jeu vidéo c’est bon pour votre cerveau. Une phrase pour enfoncer le clou :
The opposite of play is not work, it’s depression.
Autre exemple intéressant : dans une étude de 2007, il est demandé à des enfants atteint d’un cancer de se battre virtuellement contre le cancer dans un jeu en 3D. Et bien l’étude montre que l’échantillon qui a joué obtient un meilleur taux de rémission que le groupe témoin.
Enfin pour terminer cette première keynote, Jane nous reparle des super-pouvoirs que l’humanité s’est inventé :
- la parole
- l’écriture
- l’agriculture
- les villes
- .. les jeux vidéos ?
L’idée aujourd’hui est de trouver des moyens d’utiliser les capacités et le temps que les joueurs consacrent à ce loisir pour le transformer en quelque chose d’utile. 3 exemples viennent terminer son exposé. :
– les jardins collaboratifs sont des lieux de mise en culture en commun dans les villes. Grâce à une version on-line, les gens ont découvert le principe puis se sont ensuite réellement impliqués dans de vrais jardins potagers, avec la même énergie et la même résilience que sur un jeu…
– résoudre l’insolvable. Dans une publication dans Nature, un article raconte l’aventure du projet Fold-IT. Vous pouvez télécharger un jeu et commencer à jouer, en manipulant des structures en 3D de protéines. Votre temps permettra d’avancer dans la recherche sur des maladies complexes. Les premiers essais ont montré que 100 000 joueurs pouvaient refaire le travail de 30 jours de calculs… en quelques heures. Bref l’intelligence collective bat l’ordinateur. Et en plus c’est un jeu.
– troisième expérience : prédire le futur. Dans un exercice collaboratif, il est demandé à des internautes de jouer un rôle et de collaborer en mode multi-joueur, sur un moteur de jeu simple. Le scénario est le suivant : il n’y a plus de pétrole. Comment réagissez-vous ? En 6 semaines, plus de 100 000 participants vont contribuer et décrire un monde complet de A à Z sans pétrole. Et le plus croustillant : en général l’intelligence collective bat les experts du domaine sur des sujets pointus… D’autre part, s’agissant d’un projet dont le contenu est décidé par les visiteurs, des domaines seront complètement explorés et documentés. Par exemple l’architecture sans pétrole, la production de nourriture sans pétrole et même… être une mère au foyer sans pétrole. Imaginez tout ce contenu…
En 2009 lorsque les prix du pétrole ont atteint la valeur de référence de l’étude, des faits ont confirmé ce que les gens avaient raconté. Par exemple, il a été noté une augmentation de l’utilisation des transports en commun. Personne ne l’avait prédit… sauf les gamers !
Comprenons que le jeu vidéo c’est 1 milliard de joueurs… pensez à Angry Bird…
Vous pouvez suivre Jane Mc Gonigal sur Twitter : @avantgame
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Bonjour,
Le passage sur le « jeux avec les dettes » me rappelle le film WarGames avec son super ordinateur joueur (le WOPR).
Il y a quelque différence cependant : dans le film, l’ordinateur raisonnait seul alors que dans le cas présent, c’est « l’intelligence collective » des joueurs qui est mise en avant, l’ordinateur ne servant qu’à trier et organiser…
Oops : pas « quelque » mais « une ». Toujours relire après une modification et avant de soumettre 🙁
Hello, très intéressant.
Pour la dernière partie, tu peux aussi parler du joueur qui à fait une partie de Civilisation pendant 10 ans, qui donne une image de notre futur si nous continuons ainsi…