La soirée anniversaire du Paris JUG était place sous le signe de l’Open Source en France. Après une présentation d’une heure, un buffet et ensuite quelques 8 présentations, nous nous sommes tous retrouvés dans un restaurant, puis une brasserie, pour terminer tranquillement à 05h00 ce matin. Je ne vous cache pas que taper un texte ce matin sur un clavier où, en plus les lettres ne sont pas classées par ordre alphabétique, relève de l’exploit. Mais je suis là.
Après une vidéo pour lancer la soirée, Sacha Labourey monte sur la scène d’un amphithéâtre de 500 places presque plein. Le thème de sa présentation sera l’open-source et son retour sur son expérience en tant que CTO chez JBoss-RedHat jusqu’en 2005.
A la question « la révolution Open-Source a-t-elle eu lieu ? », la réponse est « Oui ! mais… ». Il est clairement établi qu’Internet a joué un rôle de catalyseur, en permettant de développer à plusieurs, que l’on soit à San Francisco ou Beijing. C’est bien le développement logiciel qui a finalement révolutionné l’open-source, plus que les systèmes d’exploitations libres.
Sacha explique ensuite que l’Open-Source apporte au monde de l’entreprise des méthodes de travail. La revue de code, les wikis, le pair-programming, sont des techniques issues du développement du monde de l’open-source. Il cite aussi l’exemple des gestionnaires de code source comme SVN qui n’utilisent pas de locks sur les fichiers, contrairement à Microsoft Visual Source Safe. Le développement libre a donc apporté à l’entreprise de nouvelles techniques de développement, ce dont je suis tout à fait d’accord. Nous pouvons extrapoler et penser que les gestionnaires de version décentralisés comme Git vont prendre de l’ampleur dans les années qui viennent par exemple.
La méritocratie reconnait les personnes sur la valeur de ce qu’elles produisent, pas sur leur intitulé de poste ou leurs diplômes. Et quelque part finalement, c’est bien ce qui fait la qualité des grands projets open-source.
Ne pas utiliser aujourd’hui de librairies FOSS (Free and Open-Source Software) est une aberration. Nous pensions il y a 10 ans qu’en conservant son code fermé, nous serions plus compétitifs. C’est en fait l’inverse. En ouvrant son code, des contributeurs externes motivés par le projet peuvent venir le renforcer et vous aider.
L’open-source a aussi permis de lutter contre les brevets logiciels. A partir du moment où du code est libre de droits, il n’y a plus de possibilités ou d’intérêts à le breveté. Rappelons qu’un Brevet Logiciel n’est ni plus ni moins qu’un péage pour se servir une rente viagère, ce qui est tout simplement merdique.
Les projets FOSS permettent aussi aux développeurs de tout horizon de travailler ensemble. Sacha a parlé d’une personne que j’ai eu le plaisir de rencontrer en février 2005, il y a 4 ans : Mladen Turk. Venu de Croatie, développeur sur mod_jk, c’était un personnage que j’avais croisé lors de ma formation JBoss (voir les vieux articles ici et là).
Aujourd’hui eXo Platform applique un nouveau mode de recrutements, où les développeurs sont co-localisés, mais les chefs de produits, les évangélistes et les leads-developpeurs sont partout dans le monde. C’est peut-être un nouveau modèle qui reflète aussi l’évolution des acteurs du monde de l’open-source ?
Sacha explique que le développement open-source est un catalyseur de l’innovation, un vecteur de partage de la connaissance. Lorsque tu mets ton code sur Internet, et que tu te fais scanner par plusieurs personnes à l’autre bout de la Terre, il y a un moment assez curieux à passer. Dans le monde de l’entreprise, les revues de codes ne sont pas si fréquentes finalement, là où dans le monde de l’Open-Source, il y a toujours quelqu’un qui peut regarder votre code à 04h du matin.
Lorsque l’on regarde le marché du développement logiciel propriétaire, nous pouvons constater une certaine inertie. Que ce soit sur la sortie de nouvelles versions, la correction de bugs, il y a un effort à fournir de la part de l’éditeur. Cet effort existe aussi dans le monde de l’open-source, mais tu es libre de proposer une correction à tout moment si tu désires avancer. Les projets FOSS font plus de versions, il y a des sorties de logiciel le 31 décembre comme un projet cité dans la soirée, bref la vie d’un projet FOSS est plus attractive qu’un produit fermé. Je ne pense pas que cela soit forcément mieux, et qu’un excès de versions n’est pas non plus un gage de qualité pour les utilisateurs finaux.
Pour terminer, Sacha Labourey s’adresse au développeur, à l’indépendant et à l’entrepreneur.
Si je suis développeur salarié, un projet open-source est un excellent moyen d’augmenter mes compétences en travaillant sur ce qui me plaît. Que ce soit en recevant du retour des autres, en se mettant en avant, en défendant ses idées, en argumentant, c’est un moyen d’acquérir une notoriété, de se faire plaisir et pourquoi pas, de faire du télétravail dans l’endroit de ses rêves. Contribuer à un projet Open-source devrait être obligatoire ! Il nous invite à nous lancer, à contribuer à l’Open Source.
En tant qu’indépendant l’Open Source est un bon moyen de proposer ses services dans le conseil et la formation. Il est important de contribuer à un projet d’envergure comme Apache Tomcat plutôt que Log4J par exemple. Enfin ne pas survendre le produit que l’on défend. Il est important de rester objectif, afin d’apporter aussi un recul nécessaire pour aider les clients finaux.
Enfin en tant qu’entrepreneur, créer aujourd’hui un projet Open Source et ensuite une entreprise est dur. Là où en 2000, il était aisé de lancer des projets, de se planter et de recommencer, les règles du jeux ont changées. A ce titre il est intéressant de voir l’aventure d’eXo Platform, de Talend ou Jahia Software aujourd’hui. J’aurai aimé avoir le retour de Sacha par rapport à 2010, et à la stratégie à adopter aujourd’hui.
L’invité surprise de la soirée
Enfin pour terminer sa présentation, pour la session questions-réponses, Sacha invite sur scène une personne qui a beaucoup compté pour moi professionnellement il y a 6 ans : Marc Fleury.
Fondateur et ancien patron de JBoss, il a cédé sa société en 2006 pour quelques 350 millions de dollar, dont 40% en cash. C’est une personne qui allie un hémisphère technique et un hémisphère business, ce qui donne quelqu’un avec une vision business capable de voir au delà de la ligne de code. Son parcours est vraiment intéressant et c’est un gars passionnant.
A Antonio qui lui fait part de son passif de BEA, il raconte l’histoire suivante : lorsqu’il était à San Francisco en 1998, il voulait entrer chez Weblogic pour y travailler. La veille de signer son contrat, coup de fil : BEA rachète par Weblogic ! Déçu de ne pas être entré chez Weblogic, il lance JBoss en 1999, et l’aventure durera 7 années. Lors de son premier training à Londres, un jeune gars au deuxième rang pose beaucoup de questions et l’intrigue : c’est Sacha Labourey, qui rejoindra JBoss ensuite quelques temps plus tard.
Marc a répondu à quelques questions, et il est resté avec nous jusqu’à 5h du matin. Aujourd’hui basé à Madrid en Espagne, il est retiré du monde Java. Passionné de musiques électroniques, il travaille sur des projets de Domotique et d’Appliance pour la maison. Nous avons eu une bonne discussion sur l’iPad. Cet appareil pour un ticket d’entrée de 400$ révolutionnera aussi le marché de la domotique. Il est clair que dans quelques années, nous pourrons contrôler notre maison avec cet appareil, qui sera aussi capable de lire vos emails, jouer vos vidéos, se comporter comme un eBook. Il explique que pour lui, l’iPad vient de faire un Reset dans le monde de la Domotique. Bref un gars passionnant, que nous espérons revoir de temps en temps à Paris.
Conclusion sur la Keynote
Très bonne présentation. Sacha apporte un oeil éclairé et avisé sur la réalité du développement open-source. Dans les bémols, je pense qu’il y a une part de témoignage sur ce qu’il s’est passé, qui ne peut plus être d’actualité aujourd’hui. En 2010 les développeurs logiciels et le monde a évolué. Mais Sacha reste au fait de l’actualité puisqu’il est investisseur et conseiller spécialisé dans des entreprises comme eXo Platform par exemple. Nuls doutes que nous le croiserons à nouveau un jour.
Merci à Sacha Labourey et à Marc Fleury au nom du Paris JUG.
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