Puisque chacun y va de sa vidéo YouTube sur le génial Claude Code, et que d’autres se lancent déjà dans de longs essais sur l’impact de l’IA sur notre métier de développeur (et de la planète), je me suis dis qu’il était aussi temps de l’ouvrir.
Les gens qui parlent de l’IA et de l’utilisation des agents pour coder, n’ont, pour la plus-part, même pas essayé réellement ses outils. Comme un Teletubbie devant un s**toy, ils se demandent encore quel est l’utilité de ces outils, et pensent déjà à la semaine de 2 jours, le reste étant de savoir dans quelle mesure ils auront toujours un boulot dans 5 ans, ou la semaine prochaine.
Cela va faire mal. Vraiment.
Les premiers qui me semblent devoir se préocupper de l’impact des outils d’assistance pour coder, ce sont les développeurs Frontend. Les deuxièmes, ce sont les personnes dans les sociétés de service et les freelances. Les troisièmes, ce sont les personnes issues de la reconversion, qui ont appris l’informatique avec Ruby on Rails, mais qui ne savent pas la différence entre un GET et un POST. Et les quatrièmes, c’est les vieux développeurs. Je garde le plus croustillant pour la fin.
Je pose le décor. Pose cet objet, ce Teletubbie ne t’a rien fait.
Pourquoi les développeurs Frontend ? Qu’avez-vous fait ?
Les agents de développement comme Claude Code ou Cursor utilisent une fenêtre de contexte. Durant la phase de développement d’une fonctionnalité, vous allez progressivement remplir ce contexte. Lorsque j’ai du créer cet écran d’administration dans notre back-office, j’ai du charger des fichiers de référence dans ma conversation avec Claude, des templates, des captures d’écran, et beaucoup de fichiers typescript.
Et cela prend de la place dans la fenêtre de contexte.
Que voulons-nous faire au final? Générer du HTML et du CSS, avec un peu de javascript dans le navigateur. Est-ce que j’ai vraiment besoin d’une librairie de composants… étant donné que Claude Code peut générer et reprendre des modèles à l’infini ? Est-ce que j’ai réellement besoin d’un framework Web, pensé pour un humain… pour coder des écrans HTML/CSS et Javascript ?
J’ai fait une autre application avec du Go et du HTMX. Le nombre de lignes (et donc le contexte) est 10 fois plus petit. Cela demande moins de token dans mon contexte. Et à la fin, j’ai une interface Web qui marche très bien.
L’avantage en ayant le front et le back dans une seule application, c’est aussi qu’il est plus facile de la faire tester. Cela rend aussi plus simple les modifications et les évolution : un seul projet. Pas deux. Et surtout, surtout cher lecteur : c’est tellement plus simple.
Pourquoi le développeur Frontend doit-il se poser des questions ? Car Claude Code peut générer autant le backend, que le frontend. C’est du code. Et cette différence, liée à de l’organisation et à l’idée de diviser les responsabilités, se retrouve complètement remise en question.
Pourquoi plus le frontend que le backend? Car je vois plus souvent des développeurs Backend monter en compétence et être capable de créer des pages ou une application mobile, que l’inverse.
Avec l’arrivée des assistants pour coder, il n’y a plus aucunes raisons de séparer le front et le back. La même personne peut faire les deux. La différence se fera sur la qualité à écrire des prompts, et à utiliser ensuite les sous-agents de Claude pour améliorer la qualité.
Je bosse dans une société de service/je suis freelance, pourquoi cela m’impacte?
Prenez un super freelance avec lequel je bosse depuis 10 mois. Pascal est spécialisé en développement Frontend, avec Vue3 et Nuxt3. Il m’aide à migrer des vieux écrans de Django, vers une application de Back office. Pascal m’a beaucoup appris, et il est freelance.
Ne pas bosser avec un outil d’assistance comme Claude, est très questionable, surtout pour les freelances. Si je peux maintenant générer ces écrans moi-même sans passer par un freelance, il faut que le freelance se repositionne, qu’il prenne ces outils et qu’il se forme sur ces outils. Ce n’est pas une discussion, c’est une réalité : moi, client, je ne payerai plus 500 euros par jour un freelance si je peux utiliser un outil avec mes internes.
Et les sociétés de service? Celles qui investissent déjà sur ces outils, qui forment leurs développeurs, et qui sont transparentes avec leurs clients, auront un impact énorme. J’ai été Directeur Général de Lunatech France pendant presque 3 ans. De 250k euros de chiffre d’affaire à 2.8m en 3 ans. De 4 développeurs à 28 développeurs. Je sais de quoi je parle : j’étais le responsable pour la France de cette entreprise.
Si j’étais encore dans ce rôle, j’aurai complètement modifié la façon de travailler des collaborateurs. Certes, nous aurions alors amélioré la productivité, mais j’ai le sentiment que cela aurait aussi mis une pression importante sur nos chers Clients. Oui toi à Niort, je pense très fort à toi. Car générer du code n’est qu’une petite partie du souci. Lorsque votre client a sa propre infrastructure… et ses équipes de QA : cela ne sert à rien de coder plus vite. Et même, financièrement, vous allez vendre moins de journées à votre client. Les TJM ne vont pas augmenter. Votre client ne va pas vous payer une licence Claude. Vous allez devoir tout prendre à votre charge. Et vous allez devoir former vos développeurs. Car si je suis une autre ESN, en compétition avec vous, c’est ce que je ferai. Et je tuerai votre entreprise.
A noter que sur ce créneau, Didier GIRARD, patron de SFEIR (ESN) raconte qu’il est prêt à investir $10 par heure et par collaborateur, car il voit le gain. Avec 10% d’améliorations sur la productivité, cet investissement est couvert. Allez lire son post sur LinkedIn sur ce sujet.
Pourra-t-on se passer d’ESN en France? J’en doute. C’est tellement ancré dans les organisations, dans les systèmes d’achats, d’appels d’offre, et de bidouille de vendeur de parpaing, que je ne vois pas ce système changer avant longtemps.
Mais sinon chers Freelance : si vous n’investissez pas du temps pour vous former sur ces outils, je doute que nous ayons envie de maintenir une relation avec vous. Et vous êtes freelance, vous n’êtes pas salarié.
Je n’ai donc pas d’état d’âme à vous remplacer par d’autres Freelances, qui sont à la page.
J’ai appris à coder en reconversion/je suis jeune diplômé : quel impact ?
Malheureusement je ne suis pas très optimiste. J’aurai peur de démarrer aujourd’hui cette carrière. Il est trop facile d’utiliser ChatGPT et de tenter de bosser avec, sans finalement comprendre le code généré. C’est vraiment difficile je pense de se discipliner, de se casser les dents sur de la difficulté et d’accepter cette énorme Friction lorsque l’on démarre.
Car ces systèmes d’agents et d’assistant pour coder, sont très « sycophantic » en Anglais. Cela se traduit en Français en « servile » ou « obséquieux ». Les agents IA « sycophantiques » sont ceux qui ont tendance à être excessivement complaisant ou flatteurs envers leurs utilisateurs. Validation des biais, évitemment du désaccord, flatterie excessive, acquiesement à l’aveugle.
Déjà que les développeurs ont le melon… ils vont encore plus se la raconter.
Losrque vous apprenez à programmer, il est important de se heurter à des difficultés, pour vous aider à comprendre, et à devenir ensuite plus indépendant. Et je ne dis pas qu’un Agent IA doit vous parler dans l’oreille avec une odeur de café froid, comme votre premier maître de stage… mais bon. Cela pose des soucis ethiques. Pourquoi un agent ne vous encouragerait-il pas à coder en TypeScript au lieu d’utiliser du Java?
Le souci de Claude Code, c’est qu’il te donne l’impression d’être bon, dès les premiers essais. Et que tu ne peux pas savoir… ce que tu ne sais pas.
There are unknowns… unknows – D. Rumsfeld
Je conseillerai de continuer à lire, à regarder des vidéos, à travailler avec d’autres développeurs. Et à ne pas s’isoler. Ne pas se mettre devant son terminal en pensant que le métier de développeur se résume à prompter, à regarder ensuite Claude code écrire du code.
C’est un métier social, créatif, où tu dois discuter avec tes clients. Un métier où tu dois abstraire un problème, proposer une solution, imaginer le résultat, et aider ton client. Ce n’est pas « juste » prompter, regarder l’épisode 4 saison 23 de « Telettubies va à la Plage et mange des Algues toxiques« .

Je suis un développeur expérimenté de 15 ans, je suis même devenu Manager, mais j’aimerai revenir au code…
Prenez Jacques, qui a 40 ans, ses parents n’avaient pas d’inspiration pour le prénom. Il se serait appelé Claude, au moins il aurait été moderne une fois dans sa vie.
Jacques est devenu un mauvais manager car c’était un bon développeur. Et que pour payer le crédit de la 3008, il fallait devenir Manager. Il travaille dans une Grande Assurance Mutualiste Française De La France. C’est in-intéressant car il passe ses journées en réunion, et il travaille avec des personnes en Asie. Il utilise ChatGPT sur son iphone car son employeur (évidemment) a bloqué l’accès. Et il s’ennuie.
Il découvre Claude code, ou Cursor, ou Windsurf. Cela lui rappelle sa jeunesse lorsqu’il était développeur (en prestation, chez la même entreprise, soyons triste jusqu’au bout…).
Et là, Jacques, ivre, imagine qu’il peut redevenir développeur.
Tu vois ce Teletubbies Jacques? Tu vois cet accessoire qu’il tient dans la main ? Jacques, non, tu ne vas pas redevenir développeur. Car il s’est passé tellement de choses entre temps.
Je n’ai pas croisé Jacques, mais je pense qu’il existe. Pourquoi n’aurait-il pas le droit de faire du développement ? Pourquoi ?
Car après tout, « n’importe qui peut coder et écrire une application » non ?
Allez, passez-moi la pelle, que je termine d’enterrer dignement les derniers espoirs de Jacques.
Et toi, vieux développeur
Je garde les vieux pour la fin. Je me garde un créneau pour la fin.
J’ai commencé à travailler en 1997. Mais j’ai commencé à coder en 1985. Je suis un vieux, qui passe encore le contrôle technique, mais qui reste un jeune dès qu’il s’agit de tester, de voir toutes ces nouvelles tendances.
Oui ces outils d’assistance au développement vont impacter notre métier.
Non, je ne pense pas que le métier de développeur va disparaître.
Cependant, j’avoue que Claude Code est plutôt très bon pour transformer une idée à la con, en un vrai projet, avec un cadrage et un découpage digne d’un Agiliste.
Tiens les Agilistes, on en parle ? Tu vas mourir, momifié en Telettubies… voir pire… non c’est horrible. A quoi allez-vous servir, vu qu’il n’y aura plus de phase de développement itératives et incrémentales avec vos post-its que l’on rêve de vous faire manger depuis 10 ans ?
A quoi va servir ma certification Scrum Master ? (je suis réellement certifié… j’ai eu une enfance difficile)
Allez voir le podcast de « The Pragmatic Engineer » et l’interview de Laura Tacho, qui anticipe que le futur goulot d’étranglement ne sera plus le développement, mais la capacité pour nos clients, à formuler correctement leurs besoins.
Cela pose cependant quelques questions : le métier de développeur est autant constitué de notre capacité à comprendre un problème… qu’à notre capacité à le résoudre en codant. Et là, cher ami chauve de 50 ans, tu vois qu’il y a un souci.
Si maintenant nos clients sont capables de savoir ce qu’ils veulent, et que nous ne sommes plus nécessaires pour coder, alors oui, nous cesserons d’exister.
(… mais bon, on a encore quelques belles années devant nous…)
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Jacques a pris cher mais c’était nécessaire !
Sinon Claude je pensais que c’était juste une blague avec Cloud mais il devient une vraie menace ce p’tit bâtard.
Bref, merci pour cet article !